ÉMILE !
Nous habitions Cusset proche de Vichy. Et nous avions un petit bus de 9 places. Chaque dimanche matin nous allions chercher Maman Jeanne pour aller ensemble au sein de l’assemblée chrétienne « Le C.E.P. » pour rendre notre culte à notre Dieu révélé en Jésus-Christ.
Émile, son mari, était âgé de plus de 80 ans. Un personnage bien bâti, mais qui, à chacun de nos passages, provoquait Michelle par des insultes. Et elle lui répondait : « Mimi, même mon petit doigt tu ne pourras pas l’empêcher de t’aimer ! »
Émile avait l’habitude, chaque jour, de traverser la route pour se rendre en face de chez lui, l’après-midi, au bar pour retrouver ses copains.
Pendant ce temps, avec nos bien-aimés « Mémé et Pépé Jayet » des pionniers de la foi, nous visitions « Maman Jeanne ».
Cette mamie allait par beau temps se promenait sur la grande place de Cusset, et elle priait, chantonnait de sa voix déraillante ses cantiques, et distribuait à des passants des traités évangéliques de T.L. Osborn. Assise sur un banc, toute personne venant s’asseoir sur ce même banc avait droit au message du salut en Jésus-Christ. Ces femmes étaient des semeuses de la Bonne Semence de l’Évangile.
Lorsque nous allions chez elle la visiter, son bonheur était de nous joindre à elle pour prier et chanter des louanges à notre Sauveur et Seigneur.
Quoique son mari Émile puisse se moquer de nous et ironiser par des expressions telles qu’en nous entendant dire Amen ! Il rétorquait « Amène ta paye avec la mienne, ça me fera une bonne quinzaine ! » Ou encore, nous entendant dire Alléluia ! Il rétorquait « Les choux sont gras ! » et bien d’autres citations de ce genre auxquelles nous ne prêtions plus aucune attention. Notre seule et unique réponse en chœur : « Tu verras Mimi, un jour tes copains t’oublieront, et tu auras besoin de Jésus ! »
Envers et contre tout, Maman Jeanne était animée de cet Amour qui supportait les sarcasmes de son Mimi ! Elle avait l’assurance que Son bien-aimé Sauveur Jésus changerait son cœur le moment venu.
Est arrivé ce jour où Émile, malade, ne pouvait pas se lever, obligé de rester au lit. Sans tarder, avec Michelle, nous nous sommes rendus à son chevet. En nous voyant, il se mit à bougonner des mots inaudibles, et en priant pour lui, il se mit à rugir (comme un lion).
Nous sommes revenus quelques jours après, et il était debout, s’aidant de ses deux cannes pour marcher.
C’est alors qu’une idée est venue à mon esprit.
« Mimi, tu veux que je t’aide à traverser la route pour aller au bar ? »
Tout en bougonnant, il accepta mon bras pour aide, afin de traverser la route. Et arrivant au bar, ses copains étaient là et le saluèrent très chaleureusement. Mais, à mon grand étonnement, il les ignora et nous nous sommes installés à une table pour prendre une consommation.
C’est alors qu’Émile en profite, en me fixant droit dans les yeux, pour me poser une question : « Dis donc, ton patron là-haut, ne va rien te dire que tu es là avec moi dans ce bar ? »
Et moi de lui répondre gentiment pour le rassurer : « Émile, Jésus, « mon patron » est là où sont les malades ! »
Notre consommation prise, il décide de rentrer chez lui, sans se soucier de ses copains. Il venait de divorcer d’avec eux. Au cœur même de ce bar, il avait choisi de suivre Jésus.
Une fois rentré, Maman Jeanne lui sert sa soupe, et m’en propose une assiette pour partager avec Émile, prenant soin d’exprimer les grâces avant de consommer. Et pour cause. Michelle me faisant de grands yeux pour me dissuader de consommer cette soupe, je fis mine de ne pas comprendre. En fait, il y avait bien des grains de blé, mais aussi d’autres grains d’une autre couleur, à la différence que Michelle me dira « tu as manger des crottes de souris !? » (Rendez grâces en toutes choses … !)
Qu’à cela ne tienne, après cela, Émile nous invite à chanter quelques cantiques qu’il connaissait pour les avoir entendus fréquemment. Il accepta Jésus dans son cœur comme Son Sauveur personnel et comme Seigneur de sa vie. Et nous avons prié notre Dieu pour Son œuvre manifestée dans le cœur d’Émile.
Les jours suivants, assis sur son lit, il dira à sa Jeannette : « Dire que nous avons perdu 40 années de notre vie ! » et à sa demande, elle lui fredonna de sa voix déraillante quelques-uns de nos vieux cantiques.
Et dans ce même temps, il est arrivé, tandis qu’elle chantait de tout son cœur, en voyant le cœur de son Mimi changé, heureuse de ce que Dieu avait exaucé ses prières, qu’elle mit un certain temps pour se rendre compte que son Mimi, assis sur son lit, s’en était allé dans sa patrie céleste. Il avait tout simplement changé d’adresse.
Comme l’exprime ce chanteur Noël Colombier dans l’une de ses œuvres : « Dieu écrit droit avec des lignes courbes ! »
La perfection de Son Amour triomphe et triomphera toujours pour une âme, dès lors que nous nous y attachons pour se rendre utilisable quand il veut et où il veut.
Dans Sa perfection,
Son serviteur,
Yves Gravet